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Boribana, le bidonville d’Abidjan sacrifié sur l’autel du développement

Rédigé par Source : Le Monde, Par Yassin Ciyow le Mardi 13 Octobre 2020 à 20:04 | Lu 838 fois


« Comment mon quartier a changé sous Ouattara » (1/2). En Côte d’Ivoire, la politique de grands travaux se fait parfois au détriment des plus pauvres, expulsés de leurs habitations.


Le 4è pont construit sur Boribana
Le 4è pont construit sur Boribana
Le vrombissement des engins de construction fait trembler le sol et les murs de la petite maison de Mamadou Sanogo. Avec dextérité, l’imam lâche son chapelet et rattrape la tasse de thé qui menace de se renverser sur le tapis du salon. « Nous avons l’habitude, dit-il. C’est comme ça jour et nuit. Nous vivons entre les machines, les enfants ne dorment plus et nous, les adultes, nous craignons à chaque instant de voir les murs s’effondrer. »
 
Depuis le palier de sa maison, Mamadou Sanogo peut observer le vaste chantier qu’est devenu son quartier. Les grues et les engins pilotés par des ouvriers de la China State Construction Engineering Corporation (CSCEC) disputent le paysage à des maisons partiellement éventrées ou entièrement démolies. Beaucoup de voisins sont partis, mais pas lui : « Je suis un résistant, affirme-t-il. Ici c’est mon quartier, ils ne peuvent pas me déguerpir si facilement ! »
 
Avec ses deux femmes et ses six enfants, Mamadou Sanogo vit à Boribana, un bidonville d’environ 70 000 habitants situé au bord de la lagune Ebrié, en plein cœur d’Abidjan. Le quartier a le malheur de se trouver sur le tracé du quatrième pont de la ville qui doit enjamber la lagune, dont les travaux ont démarré en 2018. Une fois achevé, celui-ci désengorgera l’unique axe qui relie aujourd’hui le Plateau, le quartier des affaires de la capitale économique ivoirienne, à la commune de Yopougon, où vivent plus d’un million d’habitants. Un immense espoir pour les centaines de milliers de personnes qui empruntent chaque jour cette route connue pour ses interminables embouteillages.
 
« Une pratique de truands »

Mais pour d’autres, ce chantier est surtout synonyme de « déguerpissements », le nom donné aux opérations d’expulsion des habitants qui précèdent les démolitions de quartiers. Et celles-ci vont s’amplifier dans les années à venir. En mars 2019, le ministre de la construction, Bruno Koné, annonçait la destruction d’une partie des « 132 quartiers précaires » que compte Abidjan, où vivent 1,2 million d’habitants, soit un cinquième de la population de la ville. Des expulsions massives que le ministre justifiait alors comme le moyen d’éviter que ces zones se développent « dans des conditions dangereuses et indignes pour les populations qui y habitent ». Mais l’enjeu est aussi de pourvoir en infrastructures une cité qui grandit à un rythme frénétique.
 
Ces grands travaux sont l’un des axes majeurs de la politique économique du président Alassane Ouattara, candidat à sa réélection lors de la présidentielle du 31 octobre. La croissance, qui a oscillé entre 6 % et 11 % au cours de son double mandat a été largement soutenue par ces investissements. Et les nombreux chantiers lancés à travers le pays ont valu au chef de l’Etat d’être surnommé par ses partisans le « bâtisseur », comme le fut avant lui le président Félix Houphouët-Boigny. Si l’opposition ne lui conteste pas cette qualité, elle dénonce en revanche des réalisations faites au détriment des plus pauvres dans une Côte d’Ivoire toujours rongée par les inégalités.
 
Soumaïla Doucouré, le voisin de l’imam Sanogo, arbore un tee-shirt qui résume à merveille ce paradoxe d’expulsion au service du développement : « Oui au pont, oui à une juste et préalable indemnisation ». Car si ce nouvel ouvrage est une « bénédiction pour la Côte d’Ivoire », le jeune homme se dit toutefois « en colère » : « Ils ont d’abord démoli ma maison, avant de me proposer une somme dérisoire, explique-t-il. C’est une pratique de truands, mais je ne céderai pas. »
 
Sur le papier, tous les « impactés » de cet immense chantier auraient dû recevoir une compensation, en nature ou en numéraire. D’ailleurs, sur les 142 milliards de francs CFA (216 millions d’euros) de coût du projet – le pont, ses autoroutes urbaines et ses bretelles d’accès –, essentiellement financé sous forme de prêt par la Banque africaine de développement, 34 milliards de francs CFA ont été prévus pour les indemnisations et le relogement. Après plusieurs phases de déguerpissement intervenues entre 2018 et 2020, plus de la moitié des 13 174 personnes affectées auraient touché une indemnisation, selon les statistiques officielles du Projet de transport urbain d’Abidjan (PTUA).
 
« Un mal nécessaire »

Dans les faits, « c’est complètement faux », s’insurge Sékou Sylla, le président de l’ONG Colombe Ivoire, l’un des rares à connaître sur le bout des doigts la situation de chacun des habitants concernés par le projet. Le militant demande une seule chose : « Qu’on rende publique la liste des gens qui ont bénéficié de l’argent » et qu’on la compare avec la sienne. Présent dès les premières enquêtes menées par l’Etat, Sékou Sylla a documenté toutes les étapes du projet depuis 2015. Recensements incomplets, indemnisations incohérentes, détournements de fonds, démolitions sans indemnisation préalable… La liste des dérives est longue, selon lui.
 
« Les bâtis détruits aujourd’hui sont ceux pour lesquels les propriétaires ont reçu effectivement leur indemnité d’éviction », maintient de son côté le PTUA. Si le président de Colombe Ivoire se dit « déterminé » à ce que les victimes des travaux obtiennent « ce qui leur est dû », il a aussi conscience du déséquilibre des forces : « Je me bats contre une superstructure qui fait plus d’heureux que de malheureux dans la ville, c’est la raison pour laquelle il n’y a pas de mouvement de solidarité autour de nous », lâche-t-il, dépité.
 
Heureux, Mélaine Kouadio Bi l’est et il ne s’en cache pas. Cet Ivoirien résidant en France depuis 2002 se félicite d’avoir eu « du flair ». Propriétaire d’un terrain situé non loin d’une des sorties prévues du quatrième pont, il a lancé la construction d’un hôtel de 42 chambres, « avec une piscine et même un ascenseur », dès qu’il a pris connaissance du tracé de l’ouvrage. Aujourd’hui, le prix de son terrain a été multiplié par huit. M. Kouadio Bi dit « s’inscrire en faux » contre la méthode employée pour expulser les habitants des quartiers concernés. Pour autant, affirme-t-il, il s’agit d’« un mal nécessaire » à la transformation d’Abidjan. Et l’urbanisation à grande vitesse n’est pas près de s’arrêter : un cinquième pont est déjà prévu et les travaux du métro, sans cesse repoussés depuis des années, ont démarré fin 2019.
 
Fatigués d’attendre ou de négocier leur indemnisation, certains habitants de Boribana sont aujourd’hui partis, souvent sans solution de relogement. Avec leurs faibles moyens, ils se sont déplacés vers d’autres quartiers pauvres d’Abidjan ou sa périphérie. Une solution qu’Abdoulaye et Amadou Keïta envisagent aujourd’hui après l’avoir longtemps refusée. Ces deux frères partagent avec leurs familles respectives une cour commune à Boribana. « Le jour où on ne pourra plus résister et qu’ils démoliront notre maison, nous irons faire de l’élevage à Dabou », une ville à 40 km d’Abidjan, explique Abdoulaye. Mais au rythme où elle croît, la capitale économique ne risque-t-elle pas de s’étendre un jour jusque-là, au point de les menacer de nouveau ? Dans ce cas, conclut Abdoulaye, fataliste, « nous déguerpirons encore pour que la Côte d’Ivoire avance ».





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