Le silence était lourd, pesant, presque irréel, hier, au domicile de Germain, époux d’Élise Tolla, cette mère de famille fauchée tragiquement dans un accident de la route survenu il y a quelques jours, impliquant une figure bien connue du showbiz ivoirien, Molare. C’est dans ce lieu désormais marqué par l’absence et la douleur que le médecin Dr Diagaunet Dodie, ami de longue date du couple, est venu apporter un peu de réconfort — et témoigner de l’indicible.
« J’ai trouvé un homme dévasté. Une maison brisée. Une fille orpheline en un instant », confie-t-il dans un message bouleversant.
Plus qu’un hommage, ses mots sont une alerte. Une claque. Car au-delà du drame personnel, ce sont les failles d’un système entier qui se dessinent en creux.
Selon les éléments médicaux consultés par le docteur, la violence du choc n’a laissé que peu de chance à Élise. Fractures multiples, organes vitaux irrémédiablement atteints… Une collision qui aurait pu être évitée. Une famille réduite à un deuil inconsolable. Et un homme, Molare, dont le silence et l’absence de réaction publique interrogent.
Car la question n’est plus seulement celle d’un accident. Elle est celle de la responsabilité.
Molare, de son vrai nom Soumahoro Mauriféré, est une personnalité puissante du paysage culturel ivoirien. Entre ses multiples casquettes de chanteur, d’homme d’affaires et de promoteur d’événements — notamment les PRIMUD —, il a bâti un réseau solide dans les hautes sphères du pouvoir.
Mais cette stature lui donne-t-elle le droit de passer entre les mailles du filet judiciaire ? Alors que les familles attendent des explications, la procédure semble au point mort. Aucune audition officielle, aucun communiqué clair. Un silence qui dérange.
« Quand nous n’agissons pas avec responsabilité, nous devons répondre de nos actes. C’est ainsi dans une société juste et égalitaire. Nul ne doit être au-dessus de la loi », rappelle le Dr Dodie avec fermeté. Des mots simples mais lourds de sens, dans un pays où la justice s’exerce souvent selon la position sociale de l’auteur.
Ce drame remet également au centre du débat la banalisation de la vitesse, l’absence de contrôle routier rigoureux, et l’incivisme endémique des conducteurs en Côte d’Ivoire. Il ne s’agit pas d’un cas isolé : combien de familles devront encore pleurer un proche pour qu’une réforme sérieuse voie le jour ?
Des campagnes de sensibilisation vides de contenu aux complicités silencieuses entre notoriété et autorité, c’est tout un système qui doit être interrogé. Ce n’est pas le prestige d’un homme qui est en cause, mais le droit de chaque citoyen à la justice, à l’égalité devant la loi, à la vérité.
Élise Tolla n’est pas qu’un nom sur un rapport de police. Elle était épouse, mère, amie, collègue. Elle avait des rêves, des projets, des rires à offrir. Aujourd’hui, c’est son cercueil que l’on pleure. Et sa mort ne doit pas être un fait divers de plus étouffé par la notoriété d’un homme.
Tant que justice ne sera pas rendue, ce deuil ne pourra pas être pleinement porté. Tant que la vérité ne sera pas dite, la blessure restera ouverte. Car le silence, cette fois, serait une seconde mort.
« Repose en paix Élise » conclut le Dr Dodie.